27 avril 2008

Once upon a time, le graffiti...

A voir en écoutant : Grandmaster Flash & The Furious Five - The Message



Cher lecteur,


une semaine s'est écoulée depuis que je t'ai annoncé mon renoncement à tout comportement écolo et mon ardent désir de retrouver les stigmates de la ville (cf le NB de ma précédente missive). Je suis donc enchanté de t'apprendre que mon retour aux sources s'est trouvé encouragé, stimulé et récompensé par la Galerie Bailly Contemporain. Des bombes de peinture, du graffiti, du tag, bref du Street Art, voilà ce que je me suis empressé d'aller retrouver lors du vernissage de l'exposition "Taguer n'est pas jouer".

J'entends déjà mon père s'étrangler : "quoi ?! ces dégradations de nos façades haussmanniennes et de notre métropolitain, c'est de l'art ?!". Pire, papa, elles sont désormais présentes dans les galeries et attisent l'intérêt de collectionneurs de plus en plus nombreux (aurais-je l'audace de te faire savoir qu'un mur sur lequel Banksy s'est exprimé a récemment été acquis pour un montant équivalent une collection de Rolex).
L'exposition "Taguer n'est pas jouer" offre une perspective historique du Street Art. Car le graffiti a une histoire.

Commençons par Martha Cooper, née en 1943 (comme papa).
Son travail de photographe reporter urbaine, présenté Côté Quai, donne à voir l'apparition de ce qui n'est pas encore un courant. Véritable anthropologue, elle capte, dans les années 70-80, des scènes de rue du Bronx : des enfants armés de bâtons, attitudes empruntées aux gangs, à ceux exécutant, sur un carton, les pas d'une danse encore inédite. Petite femme s'intéressant aux murs taggés et aux trains graffés, Martha témoigne de la genèse d'une expression spontanée. Son objectif saisit alors les traces éphémères de Basquiat et celles d'une communauté, encore circonscrite géographiquement et socialement.

Alors que les bibles de papa et ses amis sont "Le Capital" et le petit livre rouge (selon les sensibilités et l'appétence au col Mao), les bibles du hip-hop deviennent le film de Charlie Ahearn "Wild Style" et le livre de Martha "Spray can art", inestimable et incommensurable catalogue des figures et des styles aux sources du graffiti. Fort de cette représentation visuelle, le mouvement peut alors traverser l'Atlantique.

Poursuivons avec l'un des artistes français enfanté par "Spray can art" : Nasty.
En entrant dans la Galerie, côté Cour, je suis aussitôt transporté fin des années 80, ligne 4 ; les métros sont encore bleus, les tickets, jaunes et marrons, et sur le flanc d'une rame, je découvre les lettres N-A-S-T-Y.


Comme papa et ses amis ont abandonné le col Mao, les oeuvres de Nasty ont abandonné les coursives du métro pour les murs de la Galerie Bailly Contemporain. Le style, quant à lui, n'a pas changé : les panneaux directionnels du métro parisien exposés affichent le tracé fluide et efficace, les dégradés de couleurs et le lettrage représentatif des défricheurs du graffiti parisien.
Avec L'Atlas, on ne parle plus de la spontanéité du tag ni du graff mais de Street Art (Dinah Washington a fait place à Jamie Cullum) ; le lettrage calligraphié devient une esthétique sculpture sur bois.

Autrefois conspué (sauf par notre éternel ministre de la Culture, Jack L. -mais était-ce vraiment un bien pour le mouvement ?-), le graffiti peut désormais se targuer d'influencer des artistes contemporains émanant de circuits traditionnels : Luis Rodrigo Medina et ses toiles conçues à partir de rouleaux adhésifs et Gökce Celikel que je retrouve dans un autoportrait hip-hopesque.


Papa, à toi de voir...

Merci à Alain Rémond et Jérôme Garcin.

Exposition "Taguer n'est pas jouer"
Du 22/04/08 au 24/05/08
Galerie Bailly Contemporain
25 quai Voltaire
75007 Paris
http://www.galeriebaillycontemporain.com/
A découvrir également Nicolas Berthier, Jérôme G. Demuth, Antoine Gamard, Whan Nam Goong

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Nous aimons beaucoup ce que vous faites.
Vous nous réconciliez avec l'Art.

Merci beaucoup

Mira Jodam

Anonyme a dit…

Il n'y a pas une idée de l'art qui soit universellement partagée. Je suis resté aux beaux arts: peinture, musique...
Alors, l'art de la rue et sa volonté de choquer ou de provoquer, il faudra me laisser encore un peu de temps pour apprécier vraiment cette nouvelle "expression artistique".

Bravo pour vos chroniques.

Ba Settouf

arsène a dit…

Ouah, un condensé efficace de l'histoire du street art. Thanx guys...

Nicolas a dit…

Bonjour,
Le graffiti est un art qu'il faut partager.
Néanmoins, ne trouvez-vous pas qu'il faudrait effacer certains graffitis afin de laisser place à d'autres ?