20 avril 2008

Des chauves-souris et des hommes

A voir en écoutant : The Space Project - Patterns



Cher lecteur,


ma décision est prise ; elle est irréversible, ferme et définitive. Désormais, mon tri sera sélectif. Désormais, mon alimentation sera macrobiotique. Désormais, mes pulls seront bio. Désormais, mes meilleurs amis seront Al et Leo.
Fort de ces résolutions, je pédale en direction du vernissage de la Galerie La Ferronnerie. Imagine l'aubaine pour le néo-écolo que je suis devenu : me pâmer, enfin, devant d'autres photographies que celles de la Terre vue du Ciel. En effet, de l'exposition "Etrange fascination", deux mots retiennent mon attention : la Finlande (son ancestral souci environnemental, son golfe de Botnie et ses saunas) et les chauves-souris (19 espèces classées dans la liste rouge de la faune menacée en France, tout de même). La Finlande, parce que la photographe, Sanna Kannisto, est finlandaise. Les chauves-souris, parce qu'elles sont le thème central des oeuvres exposées.
J'entends d'ici tes réticences : Batman, pourquoi pas ; mais de là, à trouver la part d'esthétique de ce mammifère à ailes membraneuses...
Et pourtant, les portraits de ces pipistrelles donnent à voir autre chose que le monstre de notre imaginaire collectif.
L'"étrange fascination" s'exerce grâce à trois aspects du travail de Sanna Kannisto.

La recherche. La position de l'artiste est identifiable à celle d'un chercheur. Dans "Droplets of nectar", la chauve-souris apparaît comme prise sous l'oeil d'un microscope. La prise de vue renvoie aux sciences naturelles par la minutie des détails et l'observateur de l'oeuvre se retrouve lui-même chercheur. Je me surprends à disséquer du regard les fines griffes, la langue tendue vers la goutte et les ailes façon toile d'araignée ou façon dentelle (selon ton humeur).
La série de six photographies présentant les chauves-souris se nourrissant de nectar dans une éprouvette offre une étude du mouvement des ailes : en cape, tendues en pointe ou fendant l'air.

La nature morte. Les compositions de Sanna Kannisto relèvent de la tradition de la nature morte dans la peinture du XVIIe siècle. Dans "Echo acoustic flowers", le feuillage de la forêt tropicale est organisé en entité plastique. Les mots de Charles Sterling, quant à la nature morte, prennent ici tout leur sens : Sanna Kannisto "(impose) son émotion poétique devant la beauté qu'(elle) a entrevue dans ces objets et leur assemblage".

Entre réalité et fiction. L'univers de la photographe assume un paradoxe ; il parvient à concilier ultra-réalisme et magie. Dans "Nocturnal visitor", la noirceur capte le regard pour révéler ensuite la mise en scène. Saisie en vol, la chauve-souris apparaît pourtant figée. Etrange fascination. Le surréalisme n'est pas loin...
A toi de voir...

NB : finalement, j'abandonne. Le golfe de Botnie et Leo n'ont pu faire le poids face à mon pull bio déformé au premier lavage et mes hésitations devant le tri sélectif (impossible de me souvenir si l'emballage de mes corn-flakes doit finir dans la poubelle bleue ou la poubelle verte). La semaine prochaine, je retrouve donc avec délectation mon bonheur citadin : la douce odeur de la pollution et la beauté des façades graffées.


Photos courtoisie Galerie La Ferronnerie

Merci à Alain Rémond et Jérôme Garcin.

Exposition "Etrange fascination"
Du 17/04/08 au 31/05/08
Galerie la Ferronnerie
40 rue de la Folie-Méricourt
75011 Paris
http://www.galerielaferronnerie.fr/

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