9 mars 2008

Que photographie un photographié ?

A voir en écoutant : Ariel Pink - For Kate I Wait


La question m'obsède en me rendant au vernissage de la Galerie Bailly Contemporain pour les expositions "Réflecteur", galerie côté Cour, et "Hérésie", galerie côté Quai.
Le principe : des mannequins, habitués aux crépitements des flashs, passent derrière l'objectif.
A quoi m'attends-je ? des photographies trop glamour ou trop luxueusement trash et des poses trop faussement alanguies.
Point de tout cela malgré, côté Quai, des photographies prises dans un haut lieu trendy, revival quelque peu factice du Palace des 80's, sauce trash-rock-à-la-Larry-Clark en couleur ; malgré, Côté Cour, des photographies à l'impeccable graphisme noir et blanc, saveur Vogue de luxe -c'est dire-.
Point de tout cela, disais-je. Ce qui me frappe, c'est l'éclectisme des regards de ces modèles devenus photographes.
Mais reprenons chacune des expositions en détail.

"Hérésie" propose les oeuvres de trois artistes où désordre, débordement de plaisir et décadence -peut-on encore être décadent aujourd'hui ?- sont mêlés. L'une, Stéphanie Bailly, donne à partager son voyeurisme ; l'autre, Jérémy Barrois, suggère une prise sur le vif dans des photographies pourtant librement posées. La noirceur colorée des oeuvres -oxymore justifié dans ce cas de figure, je t'assure- est exacerbée par l'espace restreint de l'exposition. Enfin le troisième, Christian Fournier, explore l'art qui filme l'art en projetant un film de 6 minutes révélant les photographes à l'oeuvre. Ma paranoïa trouve là une occasion de se répandre puisque cette oeuvre me renvoie à l'omniprésence des caméras de surveillance... Brrr....

"Réflecteur" met à mal mon sens de la synthèse. Je m'amuse d'abord, m'échine ensuite, à trouver une relation entre les oeuvres de ces douze photographes ; ma conclusion est sans appel : aucun syncrétisme n'est possible. Diversité des sujets, des formats et des techniques. Tu pourras à loisir effectuer ta gymnastique faciale tant l'exposition est l'endroit idéal pour travailler tes expressions visagistiques (sic). Je peux en témoigner. Je ris devant la série de portraits de Barbara d'Alessandri (reconnaitras-tu le rire d'A.C. ?). Je suis fasciné par la démesure du corps de "Lisa" photographié par Stéphanie Bailly. Je suis intrigué par le caractère insolite de la grenouille de Christina Kruse, mélange d'image publicitaire -au premier plan, le produit vanté- et de loufoquerie -imagine, une grenouille dans un bocal, des nattes et des taches de rousseur-. Enfin, Jacques Tati s'étant réincarné en ma personne, je suis hypnotisé par le graphisme des oeuvres de Gaspar Dietrich.

Concluons par l'enigmatique "beauté des laids" de Serge Gainsbourg, en revenant à l'entrée de l'exposition avec ces deux photographies vers lesquelles je retourne à plusieurs reprises sans pouvoir me l'expliquer. Qu'en penseras-tu ?
A toi de voir...

Merci à Alain Rémond et Jérôme Garcin.

Expositions "Réflecteur" et "Hérésie"
du 29/02/2008 au 29/03/2008
Galerie Bailly Contemporain
25 Quai Voltaire
75007 Paris, à redécouvrir également les oeuvres de Lee Miller et de Milan Vukmirovic
www.galeriebaillycontemporain.com

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Peut-on encore être "décadent" ? Grande question. A l'heure où la provocation est devenue un mot d'ordre, difficile pour l'artiste d'échapper à la banalité sans sombrer dans le "dégradant".

Blog des tendances a dit…

Et on souhaite à Oeil naïf et Regard averti la bienvenue dans la blogosphère. Blogosphère qui sera peut-être analysée par l'oeil de demain comme le symbole de la "décadence" de notre société, écartelée entre individualisme/nombrilisme forcenés d'un côté et recherche éperdue de partage et donc d'amour de l'autre. Mais... Et si finalement nous étions sur le bon chemin, celui de l'équilibre. Equilibre entre moi que j'aime et vous que j'aime aussi. Ce soir, fatigué, je m'accorde la naïveté de le penser.