1 juin 2008

Entre deux Indes

A voir en écoutant : Can - Pinch


Du haut de mon oeil naïf, l'Inde est à l'image de la sauce Massala : un mélange détonant d'épices, un contradictoire syncrétisme entre tradition et modernisme. J'ai à l'esprit les chamarrés saris, les énigmatiques castes, la démesure des temples, l'extravagante beauté du Taj Mahal, l'hippiesque Pushkar et le cheese nan. Mais l'Inde me renvoie également au génie informatique, à sa récente conquête de l'espace, à la voiture low-cost Tata (1.820 euros, roues comprises) et à la prolixe industrie cinématographique de Bollywood. Drôle d'inventaire dans lequel Gandhi se perdrait...

Fort de ces apriori et faible de ma méconnaissance de l'art contemporain indien, je saisis l'occasion de l'exposition "New Indians" à la Galerie Natalie Seroussi pour découvrir l'un de ses artistes : Chintan Upadhyay.
Au premier regard, le dualisme me surprend ; je découvre des couleurs et des formes identifiables à l'Inde ancestrale en contradiction avec les factices bébés mutants.
Les toiles sont toutes identiques : de grands rectangles au fond uni sur lequel se détachent des bébés clonés.

Le fond est un aplat dont l'intense uniformité de la couleur suggère l'isolement du bébé. Chintan Upadhyay retranscrit par ce biais la solitude de l'être contemporain dans les villes surdimensionnées, modelées par les nécessités économiques et sans souci des aspirations de l'humain. L'expérience semble avoir été celle de l'artiste, originaire du traditionnel Rajasthan et ayant migré vers l'étourdissante Bombay. Sur la toile, le détail récurrent de l'ombre du bébé renforce l'isolement ; le clone est incrusté dans sa solitude.

Les bébés, véritables robots, sont semblables d'une toile à l'autre. La référence au transgénisme et au clonage est évidente. La société qui apparaît sous les pinceaux de l'artiste est une nouvelle réalité du monde, une "hyper-réalité" qui, par son excès, s'éloigne finalement du réel. Les clones n'ont pas d'identité propre ; ils sont sans substance. Seuls les extraits des peintures miniatures du Rajasthan et des images du Kama Sutra tatoués sur leur corps leur imposent une personnalité. Je m'interroge : l'artiste serait-il le seul aujourd'hui à traduire la diversité dans un environnement où prime la rassurante uniformité ?

A toi de voir...

Merci à Alain Rémond et Jérôme Garcin.

Exposition "New Indians - Chintan Upadhyay"
Du 29/05/08 au 29/06/08
Galerie Natalie Seroussi
34 rue de Seine
75006 Paris





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